Véhicule connecté : 3 questions à... Gabriel Plassat, de l'Ademe

Rédigé par Régis Chatellier

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21 juin 2016


Gabriel Plassat, cofondateur de la Fabrique des mobilités, constate l'importance du numérique et des données dans un écosystème des transports en pleine mutation. Il appelle à la création de communs autour des données de mobilité.

Gabriel Plassat est Ingénieur "Energies et Prospectives, Transports & Mobilités" à l'Ademe. Il est à l'origine et anime la Fabrique des mobilités. Lancé en 2013, cet accélérateur de projets met en relation des acteurs de l'écosystème du transport et des mobilités pour "faire émerger une culture de l'innovation dans l'action", au travers d'un appel à projet pour l'accompagnement d'entrepreneurs et d'intrapreneurs.

 

LINC : Vous animez la Fabrique des mobilités, dédiée à « l’innovation par les acteurs du transport et des mobilités » : que change vraiment le véhicule connecté dans cet écosystème, et quelles sont les tendances lourdes et émergentes à l’horizon des 5 prochaines années ?

Gabriel Plassat : Le numérique poursuit son expansion et se développe lourdement dans l'écosystème des transports. Nous pensons que la robotisation et la dépossession sont les principaux vecteurs des mutations en cours. La "voiture connectée"  fait d'abord entrer de nouveaux acteurs au plus près des consommateurs, modifiant la répartition dans la chaine de valeur. Mais la voiture connectée, c'est d'abord le ou les smartphones dans la voiture qui guide, alerte, informe. Nous avons déjà tous des voitures connectées, sauf que les constructeurs n'ont pas de lien avec ces flux de data. Chacun cherche à construire son infrastructure de donnée pour ne pas se faire désintermédier et se positionner. La voiture connectée va donc révéler et traduire la qualité des liens entre les acteurs et les clients. De nombreuses parties prenantes pourront collaborer autour de ces données : territoire, industrie, laboratoire, école, état. La Fabrique des Mobilités accompagne ces communautés et facilitent la création de communs, comme autant de ressources mutualisées et ouvertes.

 
LINC : Dans les mobilités connectées, les données (en particulier personnelles) ont une place particulière. Quels sont selon vous les grands enjeux autour des données et comment voyez-vous la place des individus dans ce monde des transports et des mobilités « intelligentes » ?


GP : Il y a de multiples données, et chaque type de donnée doit être regardé à travers l'écosystème qui la produit, la transforme, la publie et la valorise. Prenons l'exemple des données liées à nos traces de mobilité. Ces données peuvent nous identifier quasiment comme une empreinte. Elles peuvent aussi, prises dans leur ensemble, permettre à une collectivité de prendre de meilleures décisions, d'optimiser l'existant et de concevoir un système de transport public totalement adapté aux besoins. Or ces données sont aujourd'hui produites par des entreprises comme les opérateurs télécom ou par les citoyens eux-mêmes à travers des applications comme Waze qui capturent ces données et les utilisent pour renvoyer des services. Devant cette tension, nous avons souhaité avec le projet Mobilise, questionner cette production de données : "Et si le citoyen se faisait volontairement tracer pour permettre à sa collectivité de mieux décider ?". Une app a été développée et des territoires s'intéressent à cette démarche qui permet aussi de produire une ressource de traçage et production de données de mobilité ouverte : un commun. 

 

LINC : Les communs sont au cœur de votre projet, avec même un site dédié. Pour quelle raison cette démarche vous parait-elle cruciale dans le domaine des mobilités ? Parvenez-vous à embarquer des acteurs privés dans cette démarche d’ouverture et de gouvernance partagée ?


GP : C'est un pari. Plusieurs faits montrent que l'open source permet de construire des produits et des services performants, plus rapidement et avec des communautés plus larges que les démarches propriétaires. Dans la course au temps, nous pensons que l'open source et les communs sont désormais la seule voie pour cet écosystème industriel face aux plateformes numériques américaines. Les communs permettent de se coordonner plus vite, de capitaliser à chaque projet, de bénéficier des talents de chaque acteur, d'impliquer tous les acteurs comme les laboratoires, les écoles et les territoires, de baisser les barrières pour les nouveaux entrants et de mutualiser des besoins de ressources. Nous avons un site pour identifier les communs et un wiki. Nous travaillons aussi dans chaque communauté pour créer de nouveaux communs utiles pour les projets en cours. L'open source n'est pas la culture dominante d'une filière créée autour des brevets. La Fabrique propose une démarche basée sur l'action, sur la démonstration par l'exemple, en commençant par les sujets autour desquels les plus d'acteurs s'accordent. Nous avons planifié trois ateliers à la rentrée : Open data, logiciels open source et Open HardWare. Rejoignez nous !

Interview réalisée par email.

 

 

Gabriel Plassat

Gabriel Plassat est Ingénieur "Energies et Prospectives, Transports & Mobilités" à l'Ademe.

Il tient le blog Transports du futur.


Article rédigé par Régis Chatellier , Chargé des études prospectives