Numérique adolescent et vie privée (Épisode 2) : au contact des collégiennes et collégiens
Rédigé par Mehdi Arfaoui (sociologue) et Jennifer Elbaz (mission EducNum)
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15 janvier 2024Méthodologie et précautions dans l’analyse
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Cet épisode repose l’analyse de 120 d’entretiens réalisés individuellement ou en binôme dans 6 collèges de métropole française du mois de mai 2023 au mois de janvier 2024. Tout en ne constituant pas un échantillon représentatif de l’ensemble des collégiennes et collégiens en France, nous nous sommes efforcés de diversifier les types d'établissement et de respecter la parité femme/homme dans chaque collège. Parmi ces établissements, 3 sont des collèges parisiens (75), 1 est situé en banlieue parisienne (93), et 2 sont situés respectivement dans le Nord (59) et en Vendée (85). Sur les 6 collèges, 2 établissements, dont un privé, sont relativement privilégiés (123<IPS<128), tandis que 3 sont intermédiaires (112<IPS<115) et 1 est un établissement très défavorisé (IPS < 80). Les entretiens se poursuivront ainsi durant l’année 2024 afin de diversifier cet échantillon et confirmer ou infirmer nos analyses.
L'enquête s'est également appuyée sur les moments d'intervention publique du pôle d'éducation au numérique de la CNIL – dont le métier est d’intervenir régulièrement dans les établissements ou lors d'événements destinés aux mineurs. Ces interventions nous ont permis de conduire des observations participantes sur la même période (mai 2023 - janvier 2024) réalisées au fil de l’eau, et ainsi d’entrer en interaction avec des élèves, des parents et encadrants sans que ces interactions n’aient été formalisées par des entretiens. Cette présence continue sur le terrain nous a permis d’obtenir des confirmations, compléments et contrepoints aux entretiens. De même, si les parents et les encadrants n’étaient pas notre principale cible pour cette partie de l’enquête, leur présence sur les différents terrains nous a permis de les intégrer partiellement à l’analyse.
Concernant les limites méthodologiques de l’enquête :
- Notre analyse se fonde d’abord sur une collecte de données déclarative auprès d’enfants avec lesquels nous entretenons de facto une relation de subordination. Les mineurs interrogés sont donc plus que susceptibles d’avoir fortement adapté leur discours aux attentes présumées de l’interlocuteur. Pour le dire simplement, le plus souvent un adolescent cherche à adopter une attitude conforme et à livrer les réponses attendues par les adultes. Afin de compenser ces effets de l'enquête, nous avons mobilisé, autant que faire se peut, des stratégies d’entretiens visant à nous positionner « du côté » des collégiennes et collégiens par rapport aux adultes (i.e. minimisation des formes de jugements concernant les pratiques des adolescents, voire défense des mineurs et prise de position critique vis-à-vis des adultes).
- Notre grille d’entretien pose en priorité des questions en lien avec les technologies et la protection des données personnelles à travers 4 thématiques principales (accéder à la grille d’entretien) : Équipement numérique à disposition ; Perception des usages ; Connaissance et compréhension de la protection des données ; Relation avec les parents et les encadrants. De fait, nos questions étaient technocentrées et pourront, dans la poursuite de l'enquête, être complétées par davantage de questions sur les pratiques non-numériques des adolescents, et davantage prendre en compte les cas d’adolescents n’ayant pas ou presque pas accès à des outils numériques.
- Le choix de minimiser la production de données personnelles, nous a encouragé pour cette enquête à n’enregistrer aucun entretien et à procéder par prise de note en évitant toute inscription de données personnelles. Certaines formes de retour statistique des entretiens (répartition des enquêtés selon la catégorie PCS des parents, ou les revenus, par exemples) sont donc rendues impossibles.
- Les modalités pratiques de l'institution scolaire et de l'administration ont pu entraver la bonne tenue des entretiens. Il nous a par exemple fallu composer avec le temps de classe, mais également nous assurer du consentement des parents via la distribution de fiches de consentement la veille de nos interventions.
- Plusieurs éléments ont pu biaiser la constitution de notre échantillon. Tout d’abord le choix des élèves interrogés nous parfois été imposé, et s’est fait dans chaque établissement selon des modalités différentes : nous nous sommes vu proposer d’interroger au choix les personnes présentes en salle de permanence, de réaliser un tirage au sort au sein de la salle de classe, d’interroger les délégués des différentes classes, ou encore d’interroger des élèves à partir d’un échantillon « diversifié » constitué par un responsable pédagogique. De même, une partie des collèges étaient marqués par des partenariats historiques avec la CNIL ou avait fait l’objet d’interventions de sensibilisation, donnant même parfois lieu à un cadrage pédagogique spécifique de l’enseignant avant notre venue. Enfin, nous n'avons ciblé a priori que des enfants qui vont à l’école publique ou privée, ce à quoi il faut additionner une focale mise sur les enfants ayant au moins un parent responsable légal. De fait, l’ensemble des enfants ayant des trajectoires scolaires à domicile (type « Instruction en famille ») ont été exclus de l'analyse.
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